Gustave Eiffel et ses collaborateurs

Lundi 30 septembre 2019

Modifié le : 30/09/19

Gustave Eiffel n’a pas seulement été un ingénieur hors pair, mais aussi un entrepreneur doué et précoce. Sa capacité à s’entourer de collaborateurs talentueux s’est révélée déterminante dans le déroulement de sa carrière. Par Bertrand Lemoine.

Dès ses premières années en tant que constructeur de charpentes métalliques en 1864, Gustave Eiffel, alors trentenaire, décide de se lancer dans l’exportation de structures préfabriquées. Il est secondé pour cela par son bras droit, Hector Lelièvre, qu’il a connu sur le chantier du pont de Bordeaux. Après une tentative avortée en Égypte, il jette son dévolu en 1871 sur l’Amérique du Sud, et plus précisément sur le Pérou et le Chili. Ces pays sont alors en plein développement et ont besoin d’importer des bâtiments et des ponts pour répondre rapidement à leurs besoins. Mr Eiffel ne s’y rend pas lui-même mais y délègue son associé à qui il fait entièrement confiance. Lelièvre va développer avec succès les travaux dans ces pays, construisant la douane de Callao et divers bâtiments métalliques. Hélas, le décès prématuré d’Hector Lelièvre en novembre 1873 met fin à l’aventure sud-américaine. 

Théophile Seyrig, l’apporteur du marché du Pont Maria Pia

Gustave Eiffel va continuer avec succès à développer son entreprise mais en se concentrant sur la France et certains pays d’Europe. Le succès venant, il lui faut renforcer à la fois son outil de production et ses équipes. Il trouve les deux en la personne de Théophile Seyrig, brillant ingénieur de dix ans son cadet et sorti major de l’École Centrale, la même grande école par laquelle était passé Eiffel. Outre ses compétences techniques, Seyrig lui fournit aussi des capitaux. Dans cette association, entérinée en 1868 par un contrat renouvelé cinq ans plus tard, Eiffel se contente d’apporter l’actif de son entreprise et ses bénéfices anticipés, se réservant en outre la direction exclusive de l’entreprise avec signature déléguée à Hector Lelièvre. Théophile Seyrig ne peut que demander un emploi au sein de la compagnie. Son apport est pourtant décisif. C’est notamment grâce à lui que l’entreprise remporte le marché du pont Maria Pia à Porto, grâce à la solution très innovante d’arc articulé qu’il a proposée en 1875. Quatre ans plus tard, Eiffel est sollicité pour construire le viaduc de Garabit sur le modèle de celui de Porto. Seyrig demande une part de bénéfice mais Eiffel s’y oppose et rompt le contrat qui les unissait. Seyrig quitte donc l’entreprise et rejoint une société belge, Willebroeck et Cie, où il s’illustrera en construisant le viaduc Luiz Ier à Porto. Malgré des procès qui vont traîner en longueur, Seyrig n’obtiendra jamais de dédommagement.

Viaduc de Garabit
Viaduc de Garabit - © Collection Tour Eiffel

Nouguier, Compagnon et Koechlin : les acteurs du projet de la Tour

À l’occasion de la construction du viaduc Maria Pia en 1876, Gustave Eiffel fait deux recrutements majeurs pour le développement de son entreprise. Il débauche de chez son concurrent Ernest Gouin, l’ingénieur Émile Nouguier, spécialiste des études techniques et du montage des structures métalliques, ainsi que Jean Compagnon, charpentier et chef monteur de grande expérience. Tous deux seront de toutes les constructions subséquentes de l’entreprise Eiffel, dont la Tour, dont l’idée revient au premier et la direction du chantier au second. Après la brouille avec Théophile Seyrig, Mr Eiffel embauche en 1879 un jeune ingénieur de 23 ans tout juste sorti du Polytechnicum de Zürich pour effectuer les calculs du viaduc de Garabit : il s’agit de Maurice Koechlin qui accompagnera lui aussi l’entreprise au long cours. Il co-signera le projet de la Tour Eiffel, en réalisant les calculs, et dirigera l’entreprise après la retraite de Gustave Eiffel.

Le soin et la justesse dont témoigna Eiffel dans le choix de ses collaborateurs fait partie de ses grandes qualités d’entrepreneur et confirme la dimension collective des exploits constructifs qu’il a réalisés. 
 

Bertrand Lemoine est architecte ingénieur et historien. Il a été directeur de recherche au CNRS et directeur général de l'Atelier International du Grand Paris. C'est un spécialiste internationalement reconnu de l'histoire et de l'actualité de l'architecture, de la construction, de la ville et du patrimoine aux 19e et 20e siècles, en particulier de Paris, du Grand Paris et de la Tour Eiffel. Il est l’auteur de 43 ouvrages et de plusieurs centaines d’articles sur ces sujets. Il est actuellement consultant sur les questions architecturales, urbaines, numériques et énergétiques.

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